Des fruits et légumes depuis 4 générations
On peut dire que Lieven Vanlommel est tombé dedans quand il était petit ! Ses arrière-grands-parents et ses grands-parents vendaient déjà des fruits et légumes. Aujourd’hui encore toute la famille est impliquée : sa mère et son épouse sont à la création culinaire, son oncle aux achats… Mais Foodmaker ce sont aussi environ 500 employés dont une majeure partie en cuisine (plus que 300 depuis que le Covid est passé par là).
On aurait tendance à penser que lorsqu’on est « tombé dedans » les choses se mettent en place toutes seules, mais c’est rarement le cas ! Lieven est un enthousiaste, un fonceur et un bosseur. Passionné par l’alimentation saine, il fait l’école hôtelière de Coxyde et se lance très jeune dans l’entreprenariat. En 2012, il remporte le prix du ‘jeune entrepreneur de l’année’, en 2018 celui de la ‘personnalité de l’année’. Fin 2020, en plein Covid, la fédération du commerce Comeos décerne à sa chaîne de restaurants Foodmaker le Prix Mercure.
Le business model
Le concept de base semble simple : fournir une nourriture saine et bon marché basée sur les légumes si possible locaux. Encore faut-il pouvoir offrir une qualité stable sur le long terme ! Pour ce faire, un seul moyen : l’intégration totale de la production à la vente et la multiplication des points de vente.
L.V. : Nous faisons tout nous-mêmes, depuis la culture dans nos propres champs jusqu’à la cuisine, la vente dans nos restaurants et/ou la livraison. Le pesto par exemple est fait avec notre propre basilic.
Une majorité des produits provient de nos propres champs, pour le reste mon oncle va s’approvisionner au marché matinal de Malines ; il connaît tout le monde là-bas ! En été nous achetons les fruits et légumes à Murcia en Espagne. Ils ont beaucoup de champs bio. Mais si le bio est trop cher on mixe car on ne veut pas être trop chers.
Nous avons deux fermes : une de légumes bio, certifiée vegan et une de quinoa et d’épeautre, bientôt certifiée bio également. Nous nous sommes aussi lancés dans la culture des patates douces, cela nous permet de ne plus les importer d’Amérique centrale.
Le volume : c’est vraiment le point principal de notre business model : augmenter les volumes pour une meilleure rentabilité. Cela vous coûte plus cher d’acheter les ingrédients bio et de les cuisiner à la maison que d’acheter le plat cuisiné chez Foodmaker !
Foodmaker exploite 14 restaurants en propre et exporte aussi beaucoup. Nous avons ouvert 200 salad bars rien qu’à Paris. Tous les matins à 4h nos camions partent pour la France avec des produits frais. Dans un an je pense qu’on aura 30 restaurants de plus car la demande est énorme. En temps normal un Foodmaker accueille 500 à 1.000 personnes par jour ! C’est un énorme succès.
Par ailleurs, la nourriture saine est devenue un must. Avec la pandémie, les gens ont changé leurs habitudes de consommation. Lorsque j’ai commencé en 1996, environ 4% seulement des gens pensaient à manger sain au restau. 20 ans plus tard, ils étaient 40%. Depuis la Covid-19, près de 60% s’inquiètent de la qualité de la nourriture.
Breakfast 4 étoiles
Nous sommes connus pour nos superbes buffets breakfast. Avant la Covid-19 et le télétravail, de nombreuses personnes partaient plus tôt de la maison pour éviter les embouteillages et prenaient un bon petit-déjeuner chez nous avant de commencer leur journée. Nos restaurants sont généralement ouverts dès 7h du matin. Dans notre restaurant de la Toison d’Or à Bruxelles le petit déjeuner attirait jusqu’à 300 personnes par jour ! Le petit déjeuner c’est 20% de notre chiffre d’affaires.
Même les professionnels font appel à nous pour cette expertise. A l’hôtel Hubert, un hôtel 4 étoiles à quelques minutes de la Grand Place de Bruxelles, le lobby du petit-déjeuner c’est carrément un petit Foodmaker !
La crise de la Covid-19 ?
L.V. : Une catastrophe financière. Pour éviter qu’elle se transforme en catastrophe humaine, j’ai dû recapitaliser l’entreprise à hauteur de 10M°€ et c’est encore juste !
J’ai travaillé pendant 20 ans sans prendre de bénéfices pour faire grandir l’entreprise. On commençait à être plus à l’aise. Avec la crise actuelle et l’aide dérisoire qu’on nous a octroyée, je pense que je travaillerai encore les 20 prochaines années avant de récupérer la perte. Et je peux m’estimer satisfait si j’ai la chance d’éviter la faillite. Ce n’est pas le cas de tous je le sais.
Je me sens terriblement responsable de mon personnel. Ce ne sont pour la plupart pas des gens qualifiés, où vont-ils trouver un emploi si nous fermons ?
Dans notre cuisine centrale nous préparons 100.000 repas par jour, aujourd’hui nous en sommes à peine à la moitié. Nos marges sont minces car notre modèle c’est justement d’offrir des repas sains mais bon marché. Nous ne pouvons donc pas nous permettre d’augmenter les marges.
Ce qui nous a sauvés c’est la diversification. Nous avons la chance d’avoir signé des contrats à long terme avec Delhaize, Albert Heijn et Monoprix.
Nous avons aussi lancé les ‘vedge bags’. Avant nous ne faisions des box que pour une personne mais maintenant nous livrons les gens à la maison. Alors nous proposons des box pour 2 à 4 personnes. Et nous sommes débordés. La logistique est loin d’être évidente 250 box vendus c’est 250 adresses à livrer !
La crise du Coronavirus a également poussé l’entreprise à se réinventer et à se lancer sur le marché du foodservice sur lequel Foodmaker n’a pas peur d’entrer en concurrence avec les géants en place. Selon le CEO, la demande pour une nourriture saine est en telle croissance, y compris dans les restaurants d’entreprise, que le concept a de vrais beaux jours devant lui.
Quels conseils donneriez-vous à de jeunes entrepreneurs ?
Foncer, ne pas reculer devant une dose de travail, et toujours apprendre de ses erreurs. Par exemple au début lorsque je cherchais de nouveaux emplacements pour les restaurants, à deux reprises je me suis trompé. Les endroits que j’avais choisis n’étaient pas bien adaptés car je me suis rendu compte que nous avions un concept vraiment adapté à la journée. Je n’ai jamais refait cette erreur par la suite !
Des projets ?
Nous travaillons sur un projet de livraison à domicile, des ingrédients frais et bio dans des box pour cuisiner chez soi sur base d’un livre de recettes édité par Foodmaker… Mais je vous en dirai plus sous peu !
Texte : Pascale Van Weert