Le groupe
Fondé en 1866 par Henri Nestlé, c’est aujourd’hui le plus grand groupe mondial d’aliments et de boissons. Actif dans 187 pays, sur 5 continents, Nestlé emploie près de 300.000 collaborateurs… dont 800 en Belgique, la plupart travaillant sur le site d’Anderlecht à Bruxelles, les autres à Etalle, dans la province du Luxembourg, sur le site d’embouteillage des eaux Valvert et Pure Life ainsi que dans les célèbres boutiques Nespresso.
Toujours à l’avant-garde en matière de R&D dans les domaines liés à l’alimentation, le groupe vient de racheter Aimmune Therapeutics, une société américaine spécialiste des allergies alimentaires. Un sujet d’avenir on s’en doute vu le développement rapide des allergies dans toutes les couches de la population.
L’incroyable gamme
Nestlé c’est plus de 2.000 marques parmi lesquelles Nescafé, Nescafé Dolce Gusto, Nespresso, Fitness, Lion, Golden Graham, Nesquik, Bonjour, Ricoré, (pour ne citer que quelques produits consommés au petit-déjeuner !) Sans oublier les eaux : Perrier, Vittel, San Pellegrino, Hépar, Valvert … et la gamme de produits végétariens Garden Gourmet. En réalité le nombre de marques propres est tellement important qu’on pourrait sans se lasser nourrir toute la famille uniquement de produits appartenant au groupe !
Destinée à l’horeca, la gamme Nestlé Professional comprend :
- les cafés et les boissons chaudes : Nescafé et ses machines, café Buondi, Nesquik, thé Nestea
- les produits culinaires : jus, bouillons et, la marque CHEF pour toutes les sauces et les fonds ainsi que Docello pour les desserts, mousses et crèmes brûlées.
Michel Mersch
C’est en 1998 que Michel Mersch fait ses premières armes chez Nestlé comme Key Account Manager. Il ne cessera ensuite de gravir les échelons jusqu’à diriger la division ‘Céréales petit-déjeuner’ en Belgique et au Luxembourg, quelques années plus tard, il dirigera la division des produits culinaires frais dont la marque Herta pour être ensuite promu au poste de Directeur Général Nestlé Professional de Nestlé France et enfin, depuis 2018, CEO de Nestlé Belgique et Luxembourg.
C’est dans l’adversité que l’on reconnaît les véritables leaders. Dès le tout début de la crise, sans attendre les consignes des autorités, le Bruxellois a mis en place, avec ses équipes, toutes les mesures de sécurité au travail, en tâchant de réinventer la manière de travailler et en se préparant déjà à une crise sanitaire plus longue qu’imaginée à l’époque.
Une balance des risques
Pour Michel Mersch, gérer une entreprise c’est en permanence faire la balance entre les risques. Comment mettre le curseur au bon endroit ? Chaque décision devrait se prendre en pesant les risques potentiels à long terme : sur le plan sanitaire, comme sur le plan social et économique. Selon le CEO les conséquences psychologiques, économiques et sociales de la Covid-19 risquent bien de se révéler pires encore que l’impact du virus lui-même.
M.M. : « En Belgique le monde politique semble sous-estimer le potentiel de la population, l’infantiliser en imposant des mesures trop simplistes et contraignantes. Ce qu’il faudrait c’est chercher la solution qui convient le mieux à notre population. De leur côté la plupart des entreprises n’ont pas attendu les directives du gouvernement pour prendre les mesures qui s’imposaient. Je pense qu’on aurait gagné beaucoup de temps si le politique avait eu l’humilité de dire que c’était nouveau, que la situation était inédite et qu’on n’était pas encore prêts ».
Comment corriger le tir ?
M.M. : « On a un pays d’une richesse incroyable. Je pense que la Belgique a toutes les capacités pour surmonter cette crise, à condition qu’on prenne les bonnes décisions. On a fait preuve de beaucoup de bienveillance à certains égards, mais on en a manqué cruellement par ailleurs. Jusqu’à présent on n’a vu aucune réflexion à long terme, on a juste mis des sparadraps dans l’urgence. Et de ce fait on a perdu l’adhésion d’une bonne partie de la population. Les politiciens s’enlisent. Les entrepreneurs ont des idées, il faudrait leur donner plus de liberté ».
Optimiste invétéré, Michel Mersch reste cependant persuadé que la crise c’est aussi une opportunité, une occasion de se réinventer et le CEO n’est pas à court d’idées.
M. Mersch, quelles solutions, quels conseils pourriez-vous donner aux acteurs de l’horeca face à cette situation sans précédent ?
Réfléchir à long terme : car la crise va perdurer et Il faudra se rendre compte qu’elle fera partie de notre quotidien pour un long moment. Même s’il y a un vaccin il ne sera pas la panacée. Je crois davantage à une immunité collective sur le long terme. Mais même à ce moment-là , comme pour la grippe, il faudra apprendre à vivre avec et donc revoir son business model en fonction des nouvelles règles.
S’adapter dès aujourd’hui aux nécessités sanitaires : Surtout ne pas véhiculer l’impression que l’horeca est dangereux car déjà certaines personnes ne sortent plus. Or cela engendre une spirale négative car ce mode de vie n’est pas satisfaisant. Aujourd’hui un traiteur qui propose des finger foods à prendre avec les mains alors que l’on vient de toucher la rampe ou la porte d’entrée c’est dépassé. Les gens ont absolument besoin de se sentir en sécurité, de savoir que le traiteur a pensé à tout pour veiller à leur sécurité.
Adapter son modèle à la localisation : La localisation d’un établissement est importante : elle ne va pas changer à court terme ! Beaucoup d’entreprises ne prévoient pas de faire revenir les employés au travail avant la fin de l’année, et même par la suite le télétravail restera répandu. Les restaurants qui travaillent principalement le midi dans une zone de bureau vont donc perdre une partie de leur clientèle. Ils seront obligés de trouver des alternatives. Les livraisons à domicile sont parfois une solution, mais pas toujours car beaucoup se sont rendu compte que c’est un autre métier.
Être créatif : Ceux qui ont pu sortir des terrains battus et se sont montrés créatifs s’en sortent mieux. Je pense aux chefs qui n’avaient pas de terrasse et qui ont ouvert des restos éphémères, dans la nature, dans les bois, installant les clients par petits groupes dans des serres, etc.
Local, sain, authentique : Il faut s’adapter aux attentes de la clientèle aujourd’hui. Beaucoup de gens sont à la recherche d’un mode de vie plus sain, qui inclut la nourriture, mais ne se limite pas à celle-ci. Des restos proches des salles de sport pourraient offrir des repas sains à emmener chez soi après le sport par ex. Les pistes sont multiples. On oppose souvent l’épicurien à la santé, pourtant la combinaison des deux est vraiment tendance.
Penser en même temps urgence et avenir : Il faut pouvoir travailler sur l’urgence de la situation et sur la vision future en même temps. On a beaucoup parlé de staycation, les gens ont été forcés de rester en Belgique, ils sont alors à la recherche d’idées. Car ils ont besoin de contacts sociaux, ils ont envie de vivre des expériences.
L’expérience est primordiale : Aujourd’hui il faut vendre du plaisir, de la santé, offrir une expérience unique. Notre réflexion chez Nestlé est partie du produit. Ensuite nous l’avons transformé en solution : comment le produit peut-il vous aider, comment une sauce ou un fond peuvent-il faciliter le travail du chef ? Maintenant nous allons plus loin, nous tâchons de transformer la solution en expérience : gustative, de contact, de service. Nous ne vendons pas le café mais le plaisir de la tasse de café, décliné sous différentes recettes. On amène le consommateur dans un univers pour lui faire découvrir une façon radicalement différente de consommer…
Garder la passion : un peu dans tous les métiers on remarque une sorte de lassitude, il y a de moins en moins de professionnels qui sont passionnés par leur métier… Sauf dans le domaine de l’horeca justement ! Et il y aura toujours une place pour les passionnés. Je pense qu’à l’avenir les petits restaurateurs auront une carte à jouer encore plus importante qu’avant. Le consommateur est en demande, les gens ont envie de profiter. La clé c’est trouver la réponse à cette demande tout en respectant les nouvelles contraintes.
Communiquer : discuter avec les collègues, échanger avec les clients, c’est avec eux que nous avancerons. Seul on n’a pas la solution.
Mon leitmotiv : « L’union fait la force » : Je crois fortement dans les partenariats, l’échange, l’entraide, les activités croisées y compris avec d’autres secteurs comme ceux du spectacle ou de la distribution par exemple. Il n’y a pas de concurrence, il n’y a que des « concullègues ».
Texte : Pascale Van Weert
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