Malgré la période de confinement, nous avons la chance de pouvoir interviewer les deux frères Michel et Paul Haelterman ensemble.

Leur succès depuis la reprise de l’entreprise familiale en 1992 n’est plus à démontrer. HLS est aujourd’hui le plus grand distributeur de boissons indépendant sur le marché belge, livrant environ 1800 références de boissons à 3.500 clients dans le secteur HORECA et les collectivités. VA.S.CO distribue une gamme toujours plus large de vins et spiritueux ainsi que le café MASALTO, une création maison. Nul besoin de rappeler le succès de Carlsberg Importers ni de faire l’éloge de leur marque propre TAO… Au total un chiffre d’affaires cumulé de près de 150 M° d’€.

Michel, Paul, selon vous qu’est-ce qui explique votre succès ?

Paul H : Michel et moi sommes très investis. On croit très fort à l’implication personnelle des actionnaires. Nous entretenons une relation très personnelle aussi bien avec nos clients qu’avec nos équipes. Nous avons toujours voulu créer du partenariat long-terme avec des clients qui veulent grandir avec nous. C’est aussi le résultat de choix faits il y a longtemps : nous avons choisi de nous inscrire dans des produits de niche, des marques premium.

Michel H : Nous cherchons toujours à présenter un portefeuille cohérent et adapté à la clientèle. Nos consultants sont des spécialistes, ils vont choisir avec le client la gamme de produits la mieux adaptée selon le type d’établissement. Pour le client c’est aussi un gain de temps : en une seule commande, une livraison, une seule facture, ils peuvent se procurer l’ensemble de l’assortiment des boissons.

On sent parmi vos collaborateurs une vraie motivation et un enthousiasme à toute épreuve (nous les avons vus à l’œuvre durant le salon Horecatel !). Comment faites-vous pour motiver votre personnel à ce point ?

Paul H : La passion pour le métier. Nous sommes toujours à la recherche de vrais passionnés par leur produit. Exemple Pascual Anguela, sales & brand manager de MASALTO, il n’est pas seulement barista mais Q Grader, une formation d’un niveau encore supérieur. Il est totalement passionné par le monde du café. Pour Léon Cambier chez VA.S.CO, même chose. Léon est œnologue de formation et a été Secrétaire Général de la Fédération Belge des Vins et Spiritueux…

Dans tous les départements nous cherchons à attirer des talents, des gens à la recherche d’authenticité, d’une certaine cohérence. Nous sommes une entreprise familiale au sens propre et au figuré, un esprit qu’on ne retrouve pas toujours dans les multinationales.

L’entreprise familiale justement, un atout ou un défi ?

Michel H : Nous sommes tous les deux actionnaires 50/50 de toutes les sociétés du groupe mais en même temps nous avons tous les deux notre rôle spécifique, chacun selon ses affinités. Moi je suis administrateur délégué de HLS, j’ai plus d’affinités avec le secteur de l’HORECA, de la distribution, Paul est plus un homme de marketing, il s’occupe plutôt des marques : VA.S.CO, Carlsberg Importer, TAO…

Nous nous entendons aussi bien en tant qu’associés qu’en tant que frères, donc oui pour nous c’est un véritable atout.

L’entreprise a été lancée par votre grand-père, reprise et transmise par votre père… on dit parfois qu’il est aussi difficile de maintenir une affaire que de la lancer ?

Paul H : Maintenir ne fait pas partie de notre vocabulaire ! Pour nous faire du statu quo équivaudrait à revenir en arrière, nous sommes des entrepreneurs et rarement à cours d’idées, nous aimons innover, inventer et être entourés de gens passionnés et passionnants …

Michel H : L’entreprise aujourd’hui n’est plus celle que nous avons reprise il y a 30 ans. Nous étions 50, nous sommes 340. Les méthodes sont différentes, la gestion aussi ; le monde de l’entreprise est volatile. Il faut sans cesse être capable de se remettre en question.

Quel est le point faible de HLS ?

Michel H : Notre point faible c’est aussi un point fort ! Le secteur est fragile on le voit encore aujourd’hui, c’est dans l’HORECA qu’il y a le plus grand nombre de faillites. Cela rend les banquiers frileux. Alors pour aider nos clients à se développer, nous avons dû partiellement reprendre ce rôle. Nous aidons nos clients à s’installer, à reprendre un fonds de commerce, nous possédons un portefeuille d’immeubles premium à destination de l’HORECA, nous servons de caution bancaire, mettons du matériel en dépôt… le tout sur base de la confiance et d’une relation à long terme avec nos meilleurs clients. Nous sommes les seuls à offrir un tel service, cela nous rend uniques mais nous sommes de ce fait aussi plus exposés.

Paul H : Heureusement la croissance a été construite sur nos fonds propres, pour investir dans des marques et du personnel, donc malgré la crise nous sommes une entreprise saine et pas endettée. En cette période difficile c’est essentiel.

A titre personnel, de quoi êtes-vous le plus fier dans votre carrière ?

Michel H : d’avoir pu rebondir dans des périodes difficiles pour transformer les challenges en succès, comme lorsque nous avons perdu la concession Carlsberg en 1989 (pour la retrouver en 94 !) ça nous a obligés à nous réorganiser pour mieux rebondir.

Paul H : d’avoir pu constituer des équipes passionnées. Le plus grand actif d’une société c’est son personnel, tous les jours il œuvre à la croissance de l’entreprise.

Dans ce contexte particulièrement critique de crise sanitaire et économique, avez-vous un conseil à donner ?

Michel H : Nous vivons une situation complètement inédite ! C’est peut-être l’occasion pour le restaurateur de se poser les bonnes questions ? Dans certains cas, réouvrir dans un mois de la même manière serait dangereux.

Selon moi, après la crise, les gens vont vouloir profiter, sortir, rencontrer du monde mais il faudra être armé, bien documenté. On verra probablement se développer de nouvelles tendances. De nos jours le consommateur est de plus en plus demandeur d’un large choix : on va vers une carte de bières aussi large qu’une carte de vins par exemple. HLS met ses conseillers à disposition des clients pour faire le point. Aussi sur les aides dont ils pourraient encore bénéficier pour passer le cap…

Paul H : Pour celui qui avait des soucis avant c’est l’occasion de se remettre en question, de refaire un business plan et peut-être de redéfinir son offre car le pouvoir d’achat risque de diminuer. On va passer par une période compliquée, il faudra faire preuve de solidarité, mais l’homme est créatif, il va trouver des solutions !

Texte : Pascale Van Weert
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Le plus grand actif d’une société c’est son personnel, tous les jours il œuvre à la croissance de l’entreprise.

Selon notre analyse, loin d’être un hasard, la réussite des frères Haelterman s’explique par une série d’atouts savamment combinés :

  • Reprise d’une entreprise familiale quasi centenaire ET véritable esprit entrepreneur des deux frères

  • Frères ET complémentaires, chacun selon ses affinités : l’un est plus actif dans le marketing, l’autre dans la logistique et la gestion clients

  • Associés 50/50 ET toutefois indépendants : un back office commun mais des départements commerciaux distincts

  • Grand nombre de clients ET relation de confiance avec les clients les plus fidèles et fiables

  • Un personnel fidèle (très faible turnover) ET passionné par les produits

  • Distribution de marques d’importation ET distribution de marque propre (TAO- MASALTO- St Hubertus- Bionina)

  • Diversification : revenus répartis dans les activités de distribution de boissons ET l’immobilier HORECA