Comment se présente l’avenir de nos distilleries ? Dans un contexte économique décevant, le secteur belge des vins et spiritueux se raccroche déjà aux perspectives émises par le gouvernement pour contrer les achats frontaliers. « Par ailleurs, nous devons être très conscients de la nouvelle religion de l’abstinence totale prônée par certaines instances, déclare Geert Van Lerberghe, directeur de Vinum Et Spiritus, la fédération belge du secteur des vins et spiritueux. Je lance donc un appel au secteur Horeca pour qu’il nous aide à défendre nos intérêts communs ».
Vinum Et Spiritus est la fédération sectorielle belge de l’industrie des vins et spiritueux, qui représente plus de 80 membres. Les membres vont de producteurs et négociants en vin et boissons distillées à un ensemble diversifié de petites, moyennes entreprises et de multinationales. En 2024, l’ensemble du secteur belge des vins et spiritueux représentait une contribution aux recettes d’accises de 568 millions d’euros et plus de 30.000 emplois directs et indirects.
« Mais nous sommes confrontés à un climat économique défavorable. Après la crise du COVID, les achats frontaliers, surtout pour les spiritueux et en moindre mesure pour le vin, ont à nouveau augmenté et les ventes en Belgique continuent, elles, de baisser, certainement pour les spiritueux. Le pouvoir d’achat aussi reste un problème. »
Les choses peuvent-elles s’améliorer ? Les mesures prises par le gouvernement pour contrer les achats frontaliers sont déjà un signe positif.
« Le nouvel accord gouvernemental accorde déjà une attention particulière au rétablissement de la concurrence de nos entreprises belges et exprime très explicitement l’intention de contrer les achats aux frontières. Les producteurs belges, qui constituent une richesse en termes de qualité et de savoir-faire, ainsi qu’une part importante de notre économie belge, seront ainsi protégés.
La réduction de la taxe sur les emballages pour tous les produits dont le prix est supérieur à la moyenne par rapport aux pays voisins, et donc pas seulement pour le café et les boissons non alcoolisées, est également un premier pas dans la bonne direction. Le fait que le gouvernement examinera quels autres droits d’accises peuvent être réduits pour contrer les achats frontaliers offre une perspective supplémentaire. En effet, les grands écarts de prix avec les pays voisins pourront ainsi être atténués et les consommateurs belges achèteront dorénavant des vins et des spiritueux localement. N’oublions pas que notre secteur est accablé par une ‘lasagne fiscale’ qui représente aisément jusqu’à 75 % du prix d’une bouteille de vin ou de spiritueux. Le reste (25%) doit servir à financer l’ensemble des coûts, et il ne reste alors que très peu de marge. »
La consommation responsable d’alcool est un autre thème.
« Nous partageons le point de vue selon lequel la consommation excessive d’alcool est nocive pour la santé, et nous soutenons donc les efforts visant à poursuivre la mise en œuvre, l’évaluation et l’ajustement, le cas échéant, du Plan Alcool interfédéral, qui cible la consommation excessive et nocive d’alcool ».
Par ailleurs, le secteur considère qu’il est extrêmement important de continuer à encourager les modes de consommation positifs et de ne pas se contenter de les stigmatiser.
« Nous pensons que les consommateurs ont besoin d’une approche positive plutôt que de se sentir ‘pampérisés’ et limités dans leur liberté. C’est pourquoi nous poursuivons nos efforts, en collaboration avec d’autres secteurs tels que les brasseurs belges et l’Horeca afin de fournir aux consommateurs des informations compréhensibles et lisibles sur les produits, de les sensibiliser à la consommation responsable d’alcool et de cesser d’exposer les jeunes à la publicité pour l’alcool grâce à la récente révision de la convention sur l’alcool.
De plus, l’offre de variantes sans alcool augmente d’année en année, créant ainsi de nouvelles possibilités d’éviter l’abus d’alcool sans que les consommateurs n’aient à faire de compromis sur la qualité ou l’expérience ».
Cependant, le changement imminent du slogan publicitaire actuel concernant la consommation d’alcool jette le trouble…
« Nous sommes en tout cas surpris par la décision de modifier à nouveau le slogan publicitaire en ‘l’alcool nuit à la santé’. Une telle mesure est disproportionnée, car elle ne fait plus la distinction entre une consommation modérée et une consommation excessive d’alcool.
Cette nouvelle mesure, dont on sous-estime largement la portée et l’impact à long terme, causera ainsi des dommages à l’ensemble de la chaîne de valeur et à toutes les entreprises concernées, alors que l’industrie ne croit nullement en son efficacité. En outre, elle ignore tous les efforts déployés avec succès de l’industrie pour aligner le slogan sur les choix stratégiques du Plan Alcool Interfédéral. Troisièmement, cette décision est principalement basée sur une lecture très unilatérale et incomplète de la littérature scientifique ».
Heureusement, certaines tendances sont prometteuses. L’une d’entre elles est le ‘new hedonism’, où les consommateurs paient volontiers plus cher pour vivre une expérience unique. En d’autres termes : on boit moins mais mieux.
« Les consommateurs, et particulièrement les jeunes, ne recherchent plus le volume à bas prix, mais la qualité. Ils sont prêts à payer plus pour l’obtenir. »
Une deuxième tendance, surtout chez les jeunes, est l’accent mis sur le bien-être, ou le ‘zebra striping’, soit le fait de surfer entre des boissons alcoolisées et non alcoolisées.
« Une troisième tendance, mais qui m’inquiète, est la dénormalisation exagérée de l’alcool dans la société. Un discours unilatéral ignore les preuves scientifiques selon lesquelles une consommation modérée d’alcool peut faire partie d’un mode de vie équilibré. Il légitime des mesures qui rendent les boissons alcoolisées invisibles, inaccessibles et inabordables. Il est grand temps qu’en tant qu’industrie, nous réagissions de manière appropriée contre cette nouvelle religion de l’abstinence totale. Car moderation is a safe choice ».
L’objectif est notamment de collaborer plus activement avec le secteur Horeca.
« Il existe déjà de nombreuses initiatives qui informent et aident le consommateur à mieux faire face aux risques liés à l’abus d’alcool, mais malheureusement, il y a encore trop de fragmentation et le poids de ces initiatives est en partie perdu. Nous souhaitons y remédier en organisant une table ronde en juin (ndlr. date à déterminer) ».
La première édition du Brussels Bar Show, qui s’est tenue récemment au Silo à Bruxelles, a également prouvé que le secteur souhaite se manifester davantage. Avec plus de 2.000 visiteurs (barmen, professionnels des boissons et amateurs de cocktails), cette première édition a déjà été un succès. Les visiteurs ont pu rencontrer 150 barmen de haut niveau qui ont fait la démonstration de leurs compétences, plus de 150 marques de premier plan et plus de 250 recettes de cocktails uniques spécialement élaborées pour cet événement.
« Le Brussels Bar Show n’était pas un simple salon professionnel parmi d’autres, mais une plateforme de réseautage dynamique qui a rassemblé des barmen et des professionnels de la boisson de toute la Belgique. Cette première édition s’est déjà révélée être le point de rencontre annuel de l’industrie belge des bars », déclare Alice Bown, la Wine Lady of Belgium 2020, qui dirige une agence de communication spécialisée dans les vins et spiritueux (Alice Bown Agency). Elle a imaginé le concept du Brussels Bar Show en collaboration avec Hannes Desmedt, expert en cocktails et sommelier-barman primé, qui a contribué à développer le concept grâce à son expertise technique et à sa connaissance approfondie des produits.
L’ensemble de l’événement a également été ponctué de 28 séminaires et 12 sessions exclusives, animés par les plus grands noms et les talents émergents, offrant des perspectives uniques et des innovations pionnières dans l’industrie du bar.
La prochaine édition du Brussels Bar Show se tiendra les 29 et 30 mars 2026, également au Silo Brussels. A marquer d’une pierre blanche dans votre agenda !
Pour plus d’info, consultez www.vinumetspiritus.be et www.brusselsbarshow.be
[ Danny Verheyden – photos Brussels Bar Show : ©alicebown ]