Entrepreneur, éleveur, étudiant en hôtellerie mais avant tout boucher. C’est de cette manière que se définissent Hendrik, Fonzie et Raymond Dierendonck. 3 générations réunies pour nous parler de la passion de leur métier qu’ils se sont transmise et qui n’est pas prête de s’éteindre…

Dans les années 80, bien avant que les artisans de bouche redeviennent à la mode pour notre plus grand bonheur, Raymond ­Dierendonck a transmis sa passion et sa vision du métier de boucher à son fils Hendrik. Porté par cette passion, Hendrik a construit une success story qui ne cesse de croître. Il est aujourd’hui à la tête de 2 restaurants gastronomiques spécialisés en viande (Carcasse Knokke et Saint-Idesbald), 5 boucheries et il a construit l’identité ‘­Dierendonck’ avec ses visuels puissants et sans concession. ­Raymond ­Dierendonck a également transmis cette passion à son petit-fils Fonzie qui le décrit comme son mentor.

Le rendez-vous était donc pris le 15 août avec ces 3 passionnés. Fonzie n’a pas quitté du regard son père et son grand-père pendant cet entretien, dévorant chaque miette de leurs paroles. Nous avons tenté de remonter le fil de l’histoire pour savoir comment se transmet la passion d’un métier.

Raymond : L’histoire débute avec vous, comment est née cette vocation ?

Raymond : Mon beau-frère était boucher et comme j’avais une excellente relation avec ma sœur, j’étais souvent dans leur boucherie. J’ai finalement commencé à y travailler avec un contrat de 4 ans lorsque j’avais 14 ans. La vocation est arrivée comme ça. Après 10 ans d’expérience, j’ai proposé à ma femme d’ouvrir notre propre boucherie. Nous avons démarré à Saint-Idesbald car l’emplacement était idéal (lieu actuel de la boucherie mais en plus petit). Mes parents m’ont toujours soutenu même si, étant originaires de Middelkerke où il y a beaucoup de passage, ils étaient plus sceptiques pour Saint-Idesbald qui était isolé.

Qu’est-ce qui vous plaisait dans le métier de boucher ?

Raymond : C’est quelque chose qui ne s’explique pas, c’est dans le cœur. Il faut aimer son métier pour bien le faire. Ce qui m’intéresse le plus, c’est le rapport avec les clients. Mais finalement, c’est une combinaison. On a du respect pour le client et on veut lui vendre le meilleur produit donc on élève des bêtes avec soin. (Raymond a toujours son élevage de rouges des Flandres à quelques km de Saint-Idesbald).

Hendrik, quelle est la première image qui vous vient, le premier souvenir du métier de votre père ?

Hendrik : Les souvenirs sont très nombreux. Mon frère et moi, nous étions dans le maxi-cosy à côté de maman qui faisait la caisse dans la boucherie. Nous avons grandi dans l’atmosphère de la boucherie. L’été était forcément plus stressant car mes parents ne prenaient aucun congé. Nous mangions le matin, midi et soir avec les garçons bouchers. Puis en grandissant, on aidait pour les hamburgers le matin et il y avait encore les poulets à la broche à cette époque. C’était un travail pour mon frère et moi, il fallait épicer le poulet, coller le prix et le mettre sur la broche.

Hendrik, vous dites que la vocation est venue tôt, à quel âge précisément ?

Hendrik : D’aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours voulu être boucher. Mais j’ai un souvenir précis vers 17 ans pendant les vacances de Pâques. A ce moment-là, j’ai vraiment commencé à faire beaucoup plus de choses dans le métier. Tout le monde m’a toujours demandé pourquoi je voulais devenir boucher, on me disait que ce n’était pas un métier très sexy et déjà, on prédisait que les gens mangeraient moins de viande. Pour moi, c’était une évidence et j’ai toujours voulu être le meilleur dans ce domaine et offrir les meilleurs produits.

Raymond, quelle a été votre réaction quand Hendrik est venu vous dire qu’il avait envie de faire le même métier que vous ?

Raymond : J’étais tellement fier….( quelques larmes coulent, moment plein d’émotion)

Très jeune, Hendrik travaille dans la boucherie familiale, est-ce que vous avez perçu un changement dans son approche du métier par rapport à vous ?

Raymond : En hiver, je n’avais pas de travail pour lui et il allait chez d’autres bouchers. Il pouvait voir d’autres manières de travailler. Il a en fait très vite développé sa propre conception de la boucherie. J’ai toujours trouvé qu’il avait plus de finesse dans son approche que moi. J’avais de bonnes recettes mais il avait quelque chose en plus.

Hendrik : Evidemment, j’ai travaillé dans pleins de villes différentes. Tu vois des bonnes choses et des mauvaises choses. Tout ce bagage, tu le prends avec à la maison. Mais j’ai tout de même conservé certaines recettes comme le pâté grand-mère qui est la recette de papa, je n‘ai rien voulu changer. Et puis mon père par exemple travaillait déjà avec un graphiste. C’est quelque chose qui n’était pas courant pour l’époque. C’est ce qui m’a donné cette envie de soigner mes visuels.

Raymond : Et finalement, la manière dont Fonzie fera son métier sera aussi tout à fait différente, il amènera de nouvelles choses.

Fonzie, un père et un grand-père bouchers, est-ce que suivre cette voie a tout de suite été une évidence ? Ou avez-vous pensé d’abord à autre chose ?

Fonzie : A 14 ans, je voulais devenir footballeur (rires). Je voulais étudier directement la boucherie mais je devais d’abord faire l’école hotellière. C’est mon père qui m’y a poussé. Après, il voulait que je fasse aussi la pâtisserie pour avoir une vision plus large quand j’exercerais mon métier de boucher. Prochainement, je vais travailler à Leuven dans la boucherie ‘Rondou’ où tout est artisanal. C’est aussi une famille de bouchers.

Fonzie, y’a-t-il quelque chose que vous aimeriez ‘ajouter’ à cette success story familiale ?

Fonzie : Nous avons beaucoup voyagé avec mes parents. J’aimerais ouvrir un restaurant ou une boucherie à l’étranger. Peut-être aux Etats-Unis….

Hendrik : c’est vrai qu’on doit parfois se battre contre un système qui est quelque part opposé à la viande. Quand tu vois aux Etats-Unis ou au Brésil les quantités de viande qui sont mangées, c’est incroyable. Un boucher a forcément l’esprit d’entreprendre. Quand il va quelque part et que ça l’inspire, il a envie de développer quelque chose là-bas pour poursuivre son histoire.

Fonzie, le meilleur conseil donné par votre père ou votre grand-père concernant le métier de boucher ?

Fonzie : Papi, c’est mon mentor. On a travaillé ensemble dans le magasin et il m’a tout appris. Il y a eu tellement de bons conseils.

Quel est le rôle de vos épouses dans l’entreprise familiale ?

Hendrik : Nous n’aurions pas pu faire tout ce qu’on a réalisé sans nos épouses. J’ai des tas d’idées mais Evelyne, mon épouse, les structure. Evelyne a travaillé dans la boucherie pendant plusieurs années. A une certaine période, moi j’étais à Furnes et elle était à Saint-Idesbald. Nous avons senti que ça n’allait pas. Il faut qu’on soit ensemble dans notre quotidien professionnel.

Fonzie : Je trouve que maman est fantastique. Ils sont très complémentaires avec mon père.

Hendrik : Ce qu’on a senti, c’est que c’est une chance dans la vie. Mais ça met la barre haut pour nos enfants parce que c’est un challenge aujourd’hui de trouver un partenaire qui accompagne votre vocation comme ma mère et mon épouse l’ont fait.

Une dernière question pour Raymond, comment avez-vous réagi quand Hendrik a commencé à ouvrir d’autres boucheries puis finalement un restaurant ?

Au début, j’étais parfois inquiet mais quand il voulait faire quelque chose, je le soutenais toujours. Maintenant, il doit entretenir ce qu’il a construit. Il travaille beaucoup et il a beaucoup de stress. Je suis très heureux quand il part en vacances et profite avec ses enfants. La famille, c’est très important, vraiment très important !

[ Ann Vandenplas ]