Bonjour Cédric, vous êtes président de l’Association des Mastercooks of Belgium depuis bientôt deux ans
En effet, j’ai été élu en mai 2021 pour 3 ans à une grande majorité des voix (14 sur 17). J’en suis extrêmement honoré. Je suis le 7ème président en 40 ans et le plus jeune d’entre eux (48 ans), ce qui me donne pour mission implicite de rajeunir un peu l’association !

Les chefs qui ont occupé ce poste avant moi étaient tous des grands noms (Pierre Romeyer, Pierrot Fonteyne, Guy Van Cauteren, Alain Deluc, Robert Van Duüren, Frank Fol) qui ont tous marqué l’association du sceau de leur personnalité. C’est donc à la fois un grand honneur et un challenge pour moi. Je reconnais que c’était un peu stressant au début, d’autant qu’on sortait juste du COVID, on vivait tous des moments compliqués …

Ce sont des responsabilités qui n’ont rien à voir avec la gestion d’un restaurant. L’association compte 180 membres dont 120 actifs, et pas n’importe lesquels ! Il s’agit du gratin des chefs de Belgique.

Président et chef propriétaire
Être président ce n’est pas seulement représenter l’association, c’est également gérer une ASBL, des budgets, trouver des partenaires, il faut faire vivre l’association. Ce n’est pas toujours facile à conjuguer avec la gestion de mon restaurant ! Heureusement que je peux m’appuyer sur les 3 vice-présidents, l’un pour la Wallonie (Benoit Bourivain) l’un pour Bruxelles (Patrick Meirsman) et l’un pour la Flandre (Geert Gheysels), mais surtout et particulièrement sur le secrétaire général et trésorier Daniel Molmans qui est très impliqué et qui preste un temps plein au service de l’association. Nous sommes en communication au moins 4 à 5 fois par semaine pour les dossiers en cours.

Je m’implique énormément dans l’association. C’est un travail de tous les jours. J’organise des réunions, des zooms, des membres me ­téléphonent pour avoir des conseils sur les prix de l’énergie par exemple ou les loyers… J’essaye d’être extrêmement disponible pour eux, cela me semble capital.

Aujourd’hui je gère seul mon restaurant, parfois c’est lourd. Il y a tellement plus d’administratif à faire qu’il y a 23 ans quand j’ai ­commencé …

Quelles qualités pour être un bon président ?
Il faut s’impliquer, avoir une vision, être le porte étendard de l’association. Je ne sais pas si je me représenterai l’année prochaine, mais si jamais je ne fais qu’un mandat, il est sûr que ça aura été une belle leçon de vie. Je le fais vraiment avec tout mon cœur, je m’implique totalement. J’ai aussi un caractère très perfectionniste et un peu ­autoritaire !

J’ai dû m’adapter, devenir moins intransigeant, m’ouvrir plus aux autres. Dans mon restaurant je suis le chef, il n’y a que moi qui décide, au conseil d’administration des Mastercooks nous sommes 17. J’ai dû apprendre à être plus à l’écoute des autres, c’est une belle leçon de vie. Les administrateurs ont 17 personnalités différentes, ce qui apporte une énorme richesse.

Vos réalisations au sein de l’association depuis le début de votre mandat ?
Mon but est de rapprocher les membres, les réunir plus souvent entre eux et créer des contacts étroits avec les partenaires. Pour ce faire, j’essaie d’organiser minimum 3 événements par an. C’est l’occasion pour les membres de se rencontrer, d’échanger. C’est important.

Comme chaque année depuis 7 ans nous organisons fin juin la International Culinary Petanque Fiesta à Knokke, un grand évènement que j’ai lancé quand je suis rentré dans le conseil d’administration.

En septembre les membres sont invités chez notre partenaire ­Rombouts. Cette année nous avons aussi organisé un tournoi de golf au Bercuit.

Nous organisons tous les deux ans le concours ‘l’Etoile de la Cuisine belge’ renommé, le ‘Pierre Wynants Trophy’. C’est la jeune cheffe Elien Verhulst qui l’a remporté cette année. Après la Belgique, le gagnant ou la gagnante a l’occasion de participer à la Coupe d’Europe à Rimini, ensuite il (elle) peut participer au concours mondial. L’année dernière à Abou Dabi, le Young Master Sam Van Houcke s’est hissé à la 5ème place mondiale !

Parmi les jeunes il y a des chefs très talentueux, c’est pourquoi j’ai décidé d’avancer l’âge minimum pour pouvoir devenir Young ­Master : nous sommes passés de 30 à 25 ans. A 38 ans ils deviennent d’office Mastercook.

Je voudrais aussi faire rentrer plus de femmes dans l’association, il n’y en a que 8 aujourd’hui.

Nous venons d’éditer le Master Book, la bible gastronomique belge, qui contient pas moins de 120 recettes présentées par 120 chefs différents et dont une partie des bénéfices est versée à l’association 1212 pour les victimes du tremblement de terre en Turquie et en Syrie. A ce propos je tiens à remercier tout particulièrement notre secrétaire général Daniel Molmans qui a consacré énormément de temps au projet et sans qui le livre n’existerait pas !

Comment voyez-vous la situation de l’Horeca aujourd’hui ?
Je remarque qu’avec la hausse du coût de la vie, les clients font plus attention qu’avant à leur budget. Ils sont plus exigeants encore d’avoir un bon rapport/qualité prix. Les restaurants font attention à la durabilité et à l’écologie mais la clientèle pas vraiment. Aller au restaurant reste un moment de plaisir. Les produits de saison sont toujours très demandés. Depuis le COVID on fait plus attention à acheter belge qu’auparavant.

Enormément de restaurateurs mettent la clé sous le paillasson. Selon les infos de l’ONSS le secteur qui comptait 145.000 emplois avant la crise sanitaire n’en comptait plus que 120.000 en 2022 soit près de 20% en moins.
Le plus dur aujourd’hui dans l’Horeca c’est le manque de personnel et la crise énergétique. De manière générale l’Horeca a perdu 30 % de son personnel depuis le COVID ! Je dis bien en général car heureusement ce n’est pas le cas parmi les Mastercooks qui sont moins touchés par ce phénomène.

Mais la crise énergétique et l’inflation, c’est terrible. Beaucoup de restaurateurs ont investi dans des panneaux solaires. Moi malheureusement je ne peux pas le faire car mon restaurant est au rez-de-chaussée d’un immeuble mais je fais attention à tout. J’ai installé des minuteries, la salle n’est allumée que quand c’est nécessaire…

Face à l’inflation on entend que certains restaurateurs hésitent à augmenter leurs tarifs. Pensez-vous qu’il y a de la marge de ce côté ?
La plupart des restaurants ont augmenté leurs tarifs de 20 %. C’est le minimum nécessaire et les clients trouvent cela normal.

Comment devient-on Mastercook ? Faut-il être étoilé ?
Non, il ne faut pas nécessairement être étoilé, mais il faut offrir de la qualité et être constant dans ses prestations. Malgré cela, ne nous y trompons pas, tous les Mastercooks ne sont pas chers. Chez certains on peut déjà manger pour 50€ le couvert.

Comment postuler ? Il faut s’inscrire via une fiche sur notre site web, ensuite il faut répondre à une série de critères d’évaluation objectifs.
Il faut faire preuve de stabilité, être reconnu par ses pairs Mastercooks ou Young Masters. Il faut être parrainé par deux Mastercooks et approuvé par le Conseil d’administration. L’aspirant Mastercook doit défendre la gastronomie belge et travailler avec des produits belges, un restaurant de cuisine exotique par exemple ne sera pas accepté.

Du point de vue des membres qu’est-ce que ça leur apporte ?
C’est un titre honorifique, qui leur permet d’échanger avec leurs pairs et de participer à une série d’événements. Le logo Mastercook s’affiche sur la veste du chef et sur la façade du restaurant. Pour le client c’est un gage de qualité.

Dix Mastercooks vont 4 ou 5 fois par an faire des tests produit chez notre partenaire Carrefour. Les produits doivent obtenir minimum 7 sur 10 pour obtenir le label.

Chaque année une délégation de 20 Mastercooks participent à Monde Sélection. Cette année nous nous sommes rendus au Japon pour tester des produits et leur attribuer un label de qualité. C’est quelque chose que nous aimerions faire plus souvent. C’est une expérience très intéressante ; en tant que chef on en ramène toujours des idées.

L’association peut-elle encore accueillir de nouveaux membres ?
Oui bien sûr. Nous recevons d’ailleurs beaucoup de demandes, que nous ne pouvons pas toujours accepter. Nous devons aussi souvent refuser des candidats. Trois nouveaux venus, des Young Masters, sont encore entrés dans l’association récemment.

(Pascale Van Weert)

Le siège de l’association se trouve à Bruxelles, à l’ Excellis ­Experience Center, un immeuble entièrement dédié aux professionnels de l’Horeca.