La saison du gibier se profile à l’horizon! De quoi vous régalerez-vous cette année ? D’une jeune perdrix à la saveur fine et délicate, d’un puissant rôti de sanglier ou d’un tendre morceau de chevreuil ?

Les festivals résonnent de leurs dernières notes, les bars de plage pop-up replient leurs parasols et les barbecues rendent leur dernier souffle. Il est temps de passer à autre chose, aussi sur la carte de menu.

Lorsque les jours commencent à raccourcir, le gibier n’est pas loin. Les plats de gibier continuent de captiver l’imagination. Pourquoi en est-il ainsi ? À l’ère de la numérisation, de la production à grande échelle et de l’uniformisation, nous aimons nous replonger dans le passé, dans la nature. Le gibier s’accompagne toujours d’un peu de nostalgie.

Pourquoi la viande d’animaux sauvages est-elle donc si particulière ?

Les animaux qui vivent à l’état sauvage jouissent d’une liberté totale pour se nourrir de ce qu’ils rencontrent sur leur chemin. Leur régime est dès lors très varié, provenant des forêts, des champs et des landes. Et cela se goûte à la saveur de leur viande. Ces animaux sauvages se déplacent aussi en permanence. De cette manière, ils développent leurs muscles différemment de ceux d’animaux en pâturage ou en étable. L’ensemble de ces facteurs permet d’obtenir une viande plus foncée, plus sanguine et plus riche en goût.

Et à présent que la tendance générale est de manger moins de viande mais de meilleure qualité et de réduire son empreinte carbone, servir du gibier constitue une bonne option.

Le gibier est également un aliment sain grâce à l’abondance de minéraux, d’oligo-éléments et de vitamines qu’il contient. Les fibres de la viande de gibier sont plus fines que celles du bétail et contiennent en outre moins de graisse. Grâce à leur régime naturel, la viande est plus riche en graisses insaturées et en acides gras omega-3.

Dans notre pays, les zones de chasse sont trop petites pour satisfaire à l’importante demande de gibier. Une grande partie du gibier proposé dans le commerce provient donc de l’étranger. Les négoces de gibier de qualité achèteront tant que faire se peut du gibier belge et le plus possible européen. Le cerf, la biche et le lièvre proviennent ainsi de l’Europe de l’est, le faisan d’Ecosse et le canard sauvage (ou colvert) des Pays-Bas. Mais on se tourne également vers l’extérieur de l’Europe pour, par exemple, le lièvre d’Argentine ou le cerf de Nouvelle-Zélande.

Du gibier en été ?

Le gibier est associé à l’automne et c’est en grande partie justifié. Cependant, le premier gibier, notamment le canard sauvage, apparait déjà à partir du 15 août. Les canards domestiques ont plus de viande que les canards sauvages et contiennent également plus de graisse. Mais en termes de saveur, la différence entre les deux est énorme. Le canard sauvage a un goût de gibier plus riche et plus prononcé. Un canard sauvage rosé, braisé à même la carcasse et découpé ensuite en fines tranches, est une délicatesse. Pour plus de goût lors de la cuisson, remplissez donc la cavité du canard de fruits ou de jus d’orange. On accompagne généralement le canard sauvage d’une sauce au porto ou, très classique, d’une sauce à l’échalote, mais celui-ci s’accommode aussi très bien de saveurs sucrées. Des figues brièvement pochées dans le vin rouge feront la part belle à cet excellent gibier.

Les perdrix sont disponibles à partir du 15 septembre. La perdrix sauvage est assez rare et donc chère, ce qui ne permet pas toujours de la proposer sur la carte. Dommage, car la viande d’une jeune perdrix a de fervents adaptes. Une solution pourrait être de la proposer sur commande dans le restaurant. Vous reconnaitrez une jeune perdrix à son bec souple et pointu, et à ses ailes se terminant en pointe. Ses pattes sont jaunâtres. Les animaux plus âgés ont, en revanche, les pattes grises et sont gastronomiquement parlant, beaucoup moins intéressants.

Le gibier à plumes le plus populaire et aussi le plus accessible est le faisan. L’une des préparations de faisan les plus appréciées est le faisan ‘fine champagne’, agrémenté d’une sauce à base de fond de gibier, de crème et de cognac. Il est vrai que le faisan a tendance à être légèrement plus sec, mais vous pouvez éviter ce problème de quelques façons : bardez-le de lard, arrosez-le régulièrement de jus de cuisson et laissez-le reposer suffisamment longtemps avant de le découper.

Le gibier à poils

Le gibier à poils est disponible à partir du 15 octobre. Le plus grand gibier est le cerf noble. Le cerf est également un gibier assez disponible. Vous pouvez d’ailleurs vous procurer du cerf d’élevage durant toute l’année. Il provient alors de Nouvelle-Zélande où de vastes étendues de pâturage sont dédiées à leur élevage. Le cerf de Nouvelle-Zélande a une saveur plus douce et a donc un goût de gibier moins prononcé.

D’aucuns considèrent le chevreuil comme étant le gibier au goût le plus raffiné. Cette saveur est principalement due à leur alimentation. Le chevreuil se nourrit en autres d’herbes aromatiques, de bourgeons d’arbres, de plantes et de feuilles tendres.

Le gibier ayant le goût le plus prononcé est indubitablement le lièvre. Il a donc de quoi séduire les amateurs. Les lièvres chassés en novembre et décembre ont la saveur de gibier la plus intense.

Le gibier qui présente le meilleur rapport qualité-prix est le sanglier. Le marcassin peut être rôti ou grillé, les exemplaires plus âgés se prêtent mieux à la préparation de ragouts.

Menus de gibier

En tant que restaurateur, vous pouvez faire de la saison du gibier un moment festif. Il existe les menus de gibier classiques comprenant notamment une tranche de pâté de gibier agrémentée d’un confit, un consommé de gibier et ensuite du faisan, du lièvre ou du cerf en plat principal. N’hésitez pas à donner un petit mot d’explication sur l’origine de votre gibier ou habillez subtilement votre établissement sur le thème du gibier.

Mariner le gibier est totalement dépassé et souvent superflu. A fortiori le jeune gibier qui, tendre de nature, n’a certainement pas besoin d’une marinade, celle-ci risquant de masquer le délicieux goût du gibier. Pour le gibier ‘plus âgé’, une marinade à base de vin rouge, oignons, carottes, clous de girofle, thym et laurier peut faire l’affaire.

Le gibier noble à la saveur raffinée comme le chevreuil ou la perdrix n’apprécie pas les sauces trop lourdes. Les sauces à la crème ne sont donc pas conseillées. Optez plutôt pour le jus de cuisson agrémenté d’un bouillon de gibier et éventuellement un filet de vin que vous montez ensuite avec une noix de beurre.

Le gibier à la saveur plus prononcée comme le lièvre ou le sanglier donneront, par contre, parfaitement la réplique à une sauce et des garnitures un peu plus sucrées et corsées. C’est ainsi qu’il n’est pas rare d’utiliser dans la sauce accompagnant le lièvre du chocolat fondant.

La cuisine du gibier compte un certain nombre de plats emblématiques. L’un d’entre eux est le ‘lièvre à la royale’, un plat laborieux et puissant dans lequel le lièvre est garni d’une farce composée, entre autres, du cœur et du foie du lièvre. Il faut une bonne dose de connaissances et d’habilité pour le préparer comme il se doit. Ce plat n’apparait souvent plus sur les cartes. Geert Van Hecke est l’un de ces chefs qui prépare encore de temps en temps un ‘lièvre à la royale’.

Le gibier vu différemment

Nous associons souvent le gibier à la cuisine classique, alors qu’il est possible de faire preuve d’originalité avec le gibier. Pensez par exemple à des wontons garnis de lièvre et plongés dans un bouillon. Pour ce faire, enrobez du civet de lièvre dans une feuille de wonton et pochez-le dans un bouillon. Vous pouvez le servir comme amuse-bouche à l’apéritif, mais en plus grande portion également comme plat principal. Les ravioli fourrés d’un ragout de sanglier sont, de même, un plat très apprécié. Et pour rester dans l’atmosphère italienne : un carpaccio de cerf au parmesan et truffe d’hiver.

Que boire à présent avec tout ce gibier ? Pour accompagner certains plats mijotés comme un civet ou un ragout de sanglier, une trappiste brune ou même une quadruple fera parfaitement l’affaire, même si la plupart des clients opteront quand même pour du vin. L’une des maximes souvent appliquées au vin est ‘plus le gibier est rouge, plus le vin est fort’. Un peu simpliste bien sûr car cela dépend aussi des sauces ou des garnitures. C’est ainsi que le faisan apprécie tant un vin blanc qu’un vin rouge. Pour le blanc, un vin corsé comme un chardonnay, un riesling ou un chianti classico. Si vous optez pour le rouge, il est préférable de choisir un vin raffiné, sans trop de tanins. Pensez ici à un pinot noir léger ou un merlot. Le lièvre, quant à lui, demande un vin rouge puissant, un barolo est idéal.

Si vous servez du rouge avec la perdrix, optez pour un vin rouge plus léger provenant d’un climat plus frais. Vous préférez le blanc, alors un vin blanc corsé et épicé, comme le viognier, est à privilégier. Le sanglier se marie parfaitement avec un vin rouge puissant et épicé comme un cabernet sauvignon, un chianti classico ou un bourgogne.

[ Ruben De Ville ]